Chez nos amis les singes vervets

Chez nos amis les singes vervets

Après le Drakensberg, changement complet de région et de programme. Nous voici en effet dans la région du Mpumalanga, voisine du Swaziland, et non loin du parc Kruger. Le Mpumalanga est l’une des 4 provinces créées en 1994 dans l’ancienne province historique du Transvaal. Ici, plus de la moitié des personnes parle Swati ou Zoulou.

Après un bref vol « saut de puce » entre Durban et Nelspruit, la capitale provinciale, nous avons été récupérés par Clayton et Kelly dans un superbe pick-up blanc, au nom de l’ONG qui nous accueille ainsi que du lodge attenant dont s’occupe Clayton et Kelly. Les sacs sont chargés à l’arrière avec Clayton qui voyagera juché sur la plateforme pendant le trajet d’1h30 qui nous sépare du centre.

A notre arrivée, nous avons été accueillis par Mac, dont le premier prénom est John mais qui a décidé de se faire appeler Mac car trop de monde s’appelle John et, qu’une partie de sa famille étant originaire d’Ecosse, Mac lui sembla le meilleur substitut.

Une visite introductive le lendemain matin à 7h, et nous voici complètement parés pour travailler ici, au Centre de Protection des Singes Vervets.

Le singe vervet fait partie de la famille plus large des singes verts, présente dans une grande partie de l’Afrique avec 6 sous-espèces. Le singe vervet est présent principalement en Afrique de l’Est. Il est appelé ainsi du fait de la couleur de sa fourrure vert-gris sur son dos et le haut de sa tête. Mesurant de 40 à 60 cm et pesant de 4 à 6 kg, il est très présent en Afrique du Sud tout comme le babouin.

Le singe vervet peut se tenir debout sur ses pattes et vit en groupe de 30 à 50 animaux. Chaque membre du groupe est en charge de surveiller et donner l’alerte. Ils communiquent en utilisant une gamme de sons, gestes et postures dont notamment au moins 5 cris d’alarme correspondant à des menaces précises : l’Aigle, on se met à couvert et on inspecte le ciel ; le Léopard, on monte le plus haut possible ; le Serpent, on grimpe également dans un arbre et on scrute le sol, etc.

Flexible à divers environnements, les singes vervets sont considérés par une partie de la population comme des nuisibles du fait des dégâts qu’ils causent aux plantations. On les chasse donc, parfois même pour leur viande. Blessés ou perdus, les singes vervets sont alors recueillis à DIY Wild (le nom de notre centre) qui possède la licence pour les « réinsérer » dans leur milieu. Il est donc dans leur mission principale de les soigner, leur apprendre à vivre en groupe, reconstituer une tribu viable puis les relâcher.

Tranquiiillleee…
Elena s’est fait une copine

Dans chaque groupe, une hiérarchie, chez les mâles et chez les femelles. Pour l’établir, on se cherche et on s’affronte régulièrement dans de courtes passes d’arme. Ne jamais soutenir le regard d’un singe vervet ou encore rire en lui faisant des mimiques particulières, sinon il prendra cela pour un affront et commencera à vous mettre au défi en bougeant la tête et les épaules tel un boxeur, puis en émettant comme un sifflement, puis ensuite en sautant sur le grillage de sa cage et le secouant. Si vous êtes à l’intérieur, il faut surtout ne pas crier, se concentrer sur le chef pour éviter à avoir à affronter toute la bande et faire un cri fort en avançant. Bon, mieux vaut ne pas arriver à cet extrême et pour cela retenir l’évidence : ne jamais provoquer un singe, ne pas crier, ne pas courir, ne pas essayer d’attraper un singe, éviter les gestes brusques. Avec cela, 99% des situations sont évitées.

A DIY Wild, il y a environ 70 singes :

  • La troupe dite des « bébés », âgés de 1 an, dont le chef est Victor.
  • La troupe dite d’Abou, du nom de leur chef, âgés de 2 ans, et qui seront réunis à terme avec la troupe de Victor pour former une troupe de 30 individus minimum.
  • Les singes du Wild Camp, environ 30 individus, âgés de 3 ans et plus, qui ne sont plus dans une cage mais dans un espace de verdure assez large avec une clôture électrique et où l’on limite au maximum les interactions entre eux et les hommes. En effet, ils sont au dernier stade avant d’être relâchés dans la nature, à un endroit choisi par l’ONG et validé par les autorités.
  • Les singes seuls ou en duo. Ce sont généralement des spécimens particuliers soit car plus imprévisibles, agressifs, soit au contraire car martyrisés par le groupe. Parmi eux, on peut citer par exemple Dehlayla, qui grogne dès qu’elle voit Mona (ou tout autre femme) ; Joanna et Milo, 2 copines qui ne s’intègrent pas au groupe ; Berty, ex-copain de Sissi mais qui vient juste d’être relocalisé avec Valy, après avoir entaillé le crâne de Sissi…Malheureusement, ces singes « difficiles » sont souvent des singes qui furent au contact des hommes, domestiqués, martyrisés puis abandonnés.
  • Deux singes capucins vivent à part dans une très grande cage près de la piscine du lodge. Originaires d’Amérique du Sud, ils ne peuvent y être renvoyés maintenant que leurs propriétaires les ont abandonnés. Les singes capucins sont très intelligents, plus forts que les singes vervets. Ils peuvent utiliser leur queue pour se balancer et attraper les branches ; ce que ne peuvent pas faire les singes vervets.
Planning de la semaine

Nos journées sont bien chargées, similaires à la vie dans une ferme, c’est-à-dire rythmées par les besoins des animaux. Dans le salon où nous prenons nos repas, un grand tableau indique le programme pour chaque jour et l’affectation des tâches aux différents volontaires.

A 7h du matin un premier groupe (les autres peuvent dormir plus longtemps) prépare la nourriture puis la distribue aux animaux : mélange papayes-concombres-ingrédient bonus (ex. bananes, tomates, pommes, haricots verts, pâtes) pour les singes, papayes et poulets entiers pour les mangoustes, graines pour les canards et poulets, granulés pour les autruches.

A 9h, on se retrouve tous pour petit-déjeuner ensemble, puis vers 9h45 on repart effectuer diverses tâches de maintenance : couper des arbres pour changer les branchages des cages ou encore construire des cabanes pour les singes, nettoyer le ruisseau qui amène l’eau au camp, couper de l’herbe pour les singes ou pour sécuriser une bande anti-incendie autour de la propriété, trier l’arrivage en vrac des fruits et légumes, déterrer des termitières et les disposer dans les cages des singes.

De 12h à 14h, c’est l’heure du déjeuner que l’on prépare tous ensemble puis on peut se reposer, lire ou tout autre activité de son choix.

A 14h, un groupe est affecté au nettoyage des cages des singes, principalement celles des bandes à Victor et à Abou. Ca brosse, ça rince, ça ramasse pendant que nos chers amis s’installent sur nos dos, s’enroulent autour de nos cous, font leurs besoins sur nos vêtements, nous lèchent le cou et le visage, inspectent et tirent chaque fil qui pend, nous mordillent l’oreille et, amusement ultime !, s’engouffrent sous notre t-shirt à 1, 2, 3 ou 4 !

A 15h, le deuxième groupe démarre la préparation et la distribution de la nourriture pour l’après-midi.

Tout le monde finit entre 16h et 17h, bien fatigué ! Pour nous, un goûter, et on profite de la fin d’après-midi pour faire l’école aux filles…A 21 heures, nous sommes tous couchés.

Le weekend c’est relâche et nous pouvons profiter de la piscine du lodge à côté et tout simplement nous reposer. Le samedi soir, c’est Braaï (bien sûr !).

Ici, 3 devises priment :

  • « Africa Time » : qu’on soit à l’heure, 10 minutes en avance, mais plus souvent 15 minutes ou 3 heures en retard, on dit tout simplement « It’s Africa Time ». Non pas à dire que l’on est toujours en retard. Tout est plutôt ponctuel d’ailleurs dans cette mission. Mais, parce que tout peut arriver ici, on ne s’offusque pas d’un retard.
  • « This is Africa » : quelque chose que l’on ne comprend pas ? voir qui nous énerve car ne correspondant pas à nos standards Européens ? La réponse est simple : This is Africa. Ne pensez pas comme si vous étiez en France. Ces choses-là arrivent en Afrique.
  • « We will make a plan » : La réponse à la devise précédente et à tout imprévu.

Inspirés par ces devises, nous avons mieux pu appréhender les imprévus, qui sont de fait nombreux mais qui pimentent aussi le quotidien. Ainsi, en 10 jours à peine :

  • Juste avant notre arrivée Mac s’est fait mordre par Berty (singe vervet) qu’il essayait de déplacer dans une autre cage => résultat 5 points de suture, puis une infection, puis chirurgie pour tout nettoyer, puis passage obligatoire tous les 3 jours à l’hôpital.
  • L’eau se coupe sans raison en plein nettoyage des cages. L’agent de maintenance est en weekend => Ok, on finit à l’arrosoir en faisant des allers-retours à la maison.
  • La porte de la cage des mangoustes est tombée dans la nuit et 4 mangoustes se sont échappées => on les rattrape une à une. Mac en attrape une à pleine main et se fait mordre de nouveau. Doigt en sang.
  • Le chien du gérant du lodge perd la tête et se rue sur la seule et unique cigogne du centre => Il lui mord l’aile. Vétérinaire. La cigogne doit être amputée d’une aile.
  • Soirée braaï dans le jardin, steak, saucisses, bières et vin blanc, récits croisés. Soudain, sur l’horizon de la nuit, une ligne rouge, des volutes de fumée. Un incendie. Cela vient-il vers nous ? Les sacs avec les articles essentiels sont prêts. Le stress s’accroit lorsque l’on réalise qu’il n’y a ce soir-là qu’une voiture 4 places (pour 12 personnes) et que l’on apprend qu’ici, pas de pompiers. Heureusement, le vent souffle dans la direction opposée et les flammes mourront dans les premières heures du matin.
  • Il y a un serpent dans le jardin ! Il y a un serpent au milieu des arrosoirs ! Il y a un serpent entre les cages des singes ! Bien que vu tous les jours par au moins une personne, le serpent reste encore et toujours l’une des sensations de la vie au centre !
La main d’un parisien après quelques jours de bûcheronnage et coupe d’herbe
Miki, heureuse
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