Virée dans l’Outback – De Lithgow à Dubbo

Virée dans l’Outback – De Lithgow à Dubbo

Nous sommes partis sur la trace des premières expéditions vers l’Ouest australien, direction Broken Hill que nous atteindrons dans deux bonnes semaines. Près de 30 ans après l’installation de la première colonie à Port Jackson qui deviendra Sydney, les colons Européens manquent de place pour leurs terres et leurs troupeaux. Ils se heurtent aux Blue Mountains. Il faut les traverser pour espérer trouver des plaines fertiles de l’autre côté. Ce fut chose faîte en 1813 par un groupe de trois hommes : Blaxland, Lawson et Wentworth. Six mois plus tard, grâce au labeur des meilleurs prisonniers, la Great Western Road fut tracée et la ruée vers l’intérieur de l’Australie pouvait commencer et s’accélérer encore vingt ans plus tard avec la construction d’une route alternative, moins risquée bien que toujours à travers les montagnes.

Le petit village de Hartley où nous nous sommes attardés semble figé dans cette époque. Il se développa grâce et sur le bord de la Great Western Road, constituant une première étape pour les voitures de voyageurs et commerçants. Il possède plusieurs églises et même sa cour de justice qui eut beaucoup à faire compte tenu du nombre de prisonniers au passé douteux…Progrès industriel oblige, le chemin de fer fit rapidement son arrivée…mais ne s’arrêta malheureusement pas à Hartley. Il passa dix kilomètres plus loin à Lithgow, où nous fîmes une halte d’une nuit en chemin vers Orange.

Hartley

Ayant accueilli des chercheurs d’or attirés par plusieurs gisements non loin, Lithgow devint une référence industrielle avec l’ouverture de mines de charbon puis la construction des premiers hauts fourneaux d’Australie qui produisirent les premiers fer et acier du pays. Les traces de ce passé sont impressionnantes, faisant songer à des ruines d’ancienne cathédrale au milieu des minerais en fusion refroidis. L’exploitation dura environ 40 ans jusque dans les années 1930, attirant une main d’oeuvre d’immigration italienne et maltaise.

Le chemin de fer continue vers Bathurst, puis Orange, entourée de prairies où paissent surtout les moutons et réputée pour ses belles demeures et son poète, Banjo Paterson, l’un des plus grands poètes australiens avec Henry Lawson.

“There was movement at the station, for the word had passed around

That the colt from old Regret had got away,

And had joined the wild bush horses — he was worth a thousand pound,

So all the cracks had gathered to the fray.

All the tried and noted riders from the stations near and far

Had mustered at the homestead overnight,

For the bushmen love hard riding where the wild bush horses are,

And the stock-horse snuffs the battle with delight.”

(extrait, The Man from Snowy River, Banjo Paterson)

” ‘Twas Mulga Bill, from Eaglehawk, that caught the cycling craze;

He turned away the good old horse that served him many days;

He dressed himself in cycling clothes, resplendent to be seen;

He hurried off to town and bought a shining new machine;

And as he wheeled it through the door, with air of lordly pride,

The grinning shop assistant said, `Excuse me, can you ride?’ “

(extrait, Mulga Bill’s Bicycle, Banjo Paterson)

On l’appelle le poète du bush car ces poèmes honorent les hommes et femmes du bush, les drovers (conducteurs de bétail), les horsemen (cavaliers) et les shearers (tondeurs de mouton). Bien que piqués par le froid, car il faisait près de zéro degrés ce jour-là, nous avons apprécié la balade dans le centre d’Orange et ses résidences d’époque, ainsi que dans les villages environnants comme Millthorpe. Le Musée Régional d’Orange offrait une exposition insolite sur les photographes taxidermistes du museum d’histoire naturelle : spécimens de requin blanc, squelette de Kangourou, oiseau-lyre, casoar, clins d’oeil à quelques grands animaux d’Australie.

Banjo Paterson
Un bon café pour se réchauffer!

Ici, nous sommes sur le territoire des Wiradjuri, l’un des plus grands clans aborigènes du New South Wales. Non loin, à Borenore, un site important pour les Wiradjuri, l’Arche, est composé d’un grand amas rocheux traversé par une rivière et où l’humidité et le vent ont creusé nombre de grottes et de caves propices à abriter les Aborigènes et à faciliter leur rites et l’enseignement entre les générations.

Au fil des kilomètres et des vers de Banjo Paterson repris en musique par le grand Slim Dusty, les barbes se sont allongées, les chapeaux coiffèrent de plus en plus d’hommes, leur forme souple et tombante caractéristique du fermier Australien.

La route nous a mené jusqu’à Hill End, l’un des lieux emblématiques de la ruée vers l’or. Ici, on chercha partout : dans les rivières que l’on détourna des centaines de fois pour creuser les alluvions et révéler les pépites, puis directement dans la roche et les profondeurs du sol veinées de quartz dans lequel se tapit l’or. Jour et nuit les machines à vapeur concassaient le minerai dans un bruit assourdissant. Au plus fort de l’exploitation, la ville comptait 8000 habitants, deux grandes rues bordées de commerces, huit banques, vingt-huit hôtels souvent complets. On plantait sa tente, on dormait sous les vérandas, sur les billards ou à même le sol avant de suer tout le jour à la recherche du métal précieux…et d’y laisser souvent sa vie. La poussière emplissant les poumons, les chercheurs d’or ne dépassaient souvent pas 45 ans. Les filons une fois épuisés, la terre fut abandonnée, scarifiée, déchirée. Hill End fut sauvée par une vague d’artistes appréciant la quiétude du lieu et s’installant dans les anciennes demeures, donnant à la ville un second souffle.

Nous reprîmes la route pour Mudgee, plus au Nord, réputée pour ses vignobles. Ici, on travaille principalement le Cabernet Sauvignon et le Shiraz pour les rouges ; le Chardonnay, le Riesling et le Sémillon pour les blancs. Evidemment, nous avons pris quelques échantillons! A 30 kilomètres, un autre site souvent fréquenté par les Wiradjuri: Castle Rocks. Au milieu de la forêt, les rochers de grès percent les cimes et s’élèvent comme des pagodes naturelles. Le panorama sur la région est unique.

La terre devint rouge, les exploitations énormes et planes. Nous sommes en hiver, les terrains sont peu cultivés. Les entrées des exploitations sont souvent signalées par des boîtes aux lettres pour lesquels leurs propriétaires rivalisent de créativité, bien qu’un thème commun semble se dessiner. Dubbo symbolise l’entrée dans cette région des Grandes Plaines de l’Ouest. Nous n’avons pas été charmé par son style plutôt austère et fouillis. Il faut sortir de la ville pour trouver quelques attraits à la région, dans des villages plus discrets comme Trangie ou encore à Gilgandra où le Musée Rural nous a permis de faire quelques belles découvertes notamment de moulins pour puiser l’eau ou encore, notre invention préférée : la roche météorologique ! Ici le labeur est dur, depuis toujours. On laboure, on moissonne, on transporte les récoltes sur des centaines de kilomètres, sur d’énormes chariots tirés par des dizaines de chevaux…qui devinrent aujourd’hui les fameux road trains, camions sans fin tirant pas moins de trois remorques.

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